L’émissaire américain pour l’Afghanistan, Zalmay Khalilzad, était mercredi 20 mai à Kaboul, après un bref passage par Doha, pour tenter de relancer le processus de paix entre les talibans et le gouvernement afghan, sur fond de regain de violence entre les deux parties.
Le président afghan Ashraf Ghani – qui à encore signer un accord avec son concurrent Abdullah Abdullah – et Zalmay Khalilzad “ont discuté des prochaines étapes du processus de paix et tous deux ont insisté sur la nécessité d’un cessez-le-feu et d’une réduction de la violence avant toute négociation interafghane”, rapporte Tolo News, citant un communiqué de la présidence afghane.
Les discussions ont également porté sur “la façon de mener à bien l’échange de prisonniers, exigé par les talibans avant le début des discussions”, selon l’agence Reuters.
Plus tôt dans la journée, M. Khalilzad a rencontré à Doha le négociateur des talibans, le mollah Abdul Ghani Baradar, pour des entretiens “constructifs”. Au même moment, le chef des talibans Haibatullah Akhunzada a assuré dans un communiqué, repris par Al Jazeera, qu’il entendait respecter l’accord avec les États-Unis, exhortant “l’autre camp à honorer ses engagements et à ne pas gâcher cette opportunité unique”.
Les États-Unis et les talibans avaient signé un accord historique en février dernier, prévoyant le retrait des troupes américaines d’Afghanistan, en échange de l’engagement des talibans à négocier la paix avec le gouvernement afghan.
Mais si le retrait américain est en cours, les talibans n’ont pas déposé les armes, et les violences interafghanes se sont multipliées ces dernières semaines.
Selon un rapport des Nations unies, publié par The Hill, “les talibans ont été responsables de la mort de 208 civils en avril, soit 25 % de plus qu’en avril 2019, tandis que les forces afghanes ont tué 172 civils (le même mois), soit une augmentation de 38 % par rapport à l’année précédente”.
“Les parties se sont engagées à trouver une solution pacifique et devraient protéger la vie des Afghans, et ne pas mettre en péril l’espoir de la population de voir la fin de la guerre”, a déclaré Deborah Lyons, responsable de la mission onusienne en Afghanistan (Manua).
“Négocier la fin de la guerre”
Dans une colonne d’opinion, publiée par The Guardian, Kate Clark, codirectrice de l’Afghanistan Analysts Network, observe qu’il est “commun, pour les différentes parties d’un conflit, de parler et de se battre pendant un processus de paix. Cependant, quand cela arrive, il faut qu’il y ait un vrai désir de négocier la fin de la guerre”.
Elle émet des doutes sur les motivations réelles des talibans. “Il est plausible que pour les talibans, l’accord avec les États-Unis ne soit qu’une façon de se débarrasser de leur plus dangereux ennemi, en laissant Kaboul vulnérable”, analyse-t-elle. “L’approche américaine ne repose que sur la bonne volonté des talibans”.
Dans un éditorial, le Washington Post souligne lui aussi les faiblesses originelles de l’accord entre Américains et talibans. Selon le quotidien, les pourparlers de paix “auraient plus de chance d’être un succès si M. Trump indiquait clairement qu’aucun retrait américain supplémentaire n’aura lieu tant que les discussions n’auront pas commencé, et abouti à un cessez-le-feu”.
“En l’état actuel des choses, les talibans ont tout intérêt à attendre de voir si M. Trump ordonne le retour des troupes restantes avant l’élection présidentielle américaine – en dépit des conséquences pour une nation dont le sort, comme il l’a clairement démontré, lui importe peu”, conclut le journal américain
Source : Courrier International